Ce sujet concerne tous les départements mais la mobilisation Ariégeoise a été particulièrement importante et relayée dans les médias. C’est d’ailleurs à travers des extraits d’articles de presse que nous allons résumer ce sujet.
La loi sur l’eau de 2006 vise à retrouver un « bon état » écologique des masses d’eau douce. Mais discrètement, pour complaire à la FNSEA, le gouvernement a entrepris de soustraire une partie des cours d’eau à l’application de la loi.
Manuel Valls, [alors] Premier ministre, décide de se soumettre au lobby agricole, et commande en novembre 2014 un rapport sur « la mise en œuvre des contrôles » de terrain à la députée socialiste de l’Ariège Frédérique Massat. Le texte, publié fin mai 2015, ne peut que combler la FNSEA, car il prend parti, jusqu’à la caricature. On y lit par exemple cette phrase d’anthologie, qui ridiculise toute inspection de terrain : « La mission recommande qu’aucun constat de non-conformité ne soit dressé pour des points de contrôle dont les règles n’auraient pas été portées à la connaissance des agriculteurs en temps utile ».
En somme, nul n’est censé ignorer la loi, sauf les paysans. Au-delà, le rapport ouvre une porte à des enjeux plus lourds encore, en réclamant la réalisation de cartes des cours d’eau, département par département. Pour la FNSEA, c’est décisif, car si un ru ou un ruisseau ne sont plus considérés comme des cours d’eau, ils ne relèvent évidemment plus de la loi qui les protège.
Au départ, lors du lancement de l’opération d’identification en 2016, seuls les cours d’eau les plus évidents étaient en bleu sur la carte : l’Ariège, la Lèze, l’Arize et leurs principaux affluents. Le reste — une myriade de rus, ruisselets, ruisseaux souvent située en amont des fleuves — se retrouve teinté d’un rouge inquiétant.
« Sous la pression de la profession agricole, ruisseaux, rus et ruisselets perdent tour à tour leur dénomination de cours d’eau pour devenir fossé, canal ou ravine. Or, sans ce statut protecteur, ces innombrables petits bras aquatiques se retrouvent hors des normes limitant les épandages phytosanitaires, les travaux de calibrage, les constructions et autres barrages hydrauliques.
« Le plus simple aurait été que le gouvernement demande aux préfets de rectifier leurs arrêtés » C’est d’ailleurs ce qu’a reconnu le Conseil d’État dans une décision du 26 juin 2019. En s’appuyant sur « le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante », les juges ont ainsi estimé que « les dispositions [des arrêtés] ne peuvent être regardées comme conduisant, par elles-mêmes, à une protection moindre de l’environnement ». D’après eux, l’affaire est donc entendue : les points d’eau à protéger sont ceux de la cartographie « police de l’eau » ET des cartes IGN.
Grâce à ce coup de pouce du Conseil d’État, les associations environnementales ont à ce jour fait reconnaître l’illégalité de 12 arrêtés, dont celui de l’Aude. « Les tribunaux administratifs n’annulent pas complètement les textes, mais ils les complètent pour qu’il n’y ait pas de régression », se réjouit Hervé Hourcade. Reste que nombre d’arrêtés préfectoraux insuffisants demeurent toujours en vigueur. « Le plus simple aurait été que le gouvernement demande aux préfets de rectifier leurs arrêtés, soit en prenant une instruction ministérielle, soit en modifiant son arrêté de mai 2017 », souligne Benjamin Hogommat. Ce qu’il n’a manifestement pas fait. En attendant, des milliers d’écoulements se retrouvent sans protection face aux pulvérisateurs.
En Ariège :
L’association Le Chabot réalise un énorme travail bénévole contre la disparition du chevelu hydrographique et des cours d’eau intermittents (Le CEA a très modestement participé, assez cependant pour entrevoir la difficulté de la tâche).
Le juge administratif sollicité par FNE-MP et Le Chabot, a contré la préfecture qui prétendait écarter nombre de points d’eau à prendre en compte pour l’utilisation des produits chimiques de traitement :
« Il résulte de tout ce qui précède que l’arrêté de la préfète de l’Ariège du 7 juillet 2017 doit être annulé uniquement en tant que cet arrêté n’inclut pas dans la définition des points d’eau du département les points d’eau permanents ou intermittents figurant en points, traits continus ou discontinus sur les cartes de l’IGN au 1/25 000e ».
A lire aussi :
« En Ariège avec les aventuriers des ruisseaux perdus » (Libération du 05/10/24)
Merci à

pour le travail mené